Le parlement grec vient d’approuver dans la douleur « l’accord[i] » trouvé en urgence entre la Grèce et ses créanciers dans le cadre de son maintien dans la zone euro et de la perspective d’un troisième plan d’aide [ii]. Cet accord est intervenu dans un contexte de détresse accrue de la population grecque et lui impose de nouvelles « réformes sérieuses » dont des réformes juridiques comme celle du code de procédure civile [iii] et d’autres se traduisant par des nouvelles mesures d’austérité.
D’autres parlements vont être amenés à se prononcer sur cet accord ou l’ont déjà fait.
L’Union européenne connaît sa pire crise au cours de sa jeune histoire de paix entre ses peuples. Le monde entier, et en tout premier lieu les autres pays européens, regardent avec attention son devenir.
Les économistes s’affrontent sur la pertinence de l’accord. Les hommes politiques européens sont divisés. Les opinions publiques également. Attisées sans doute par des déclarations excessives de certains politiciens et des prises de positions de médias non exemptes d’animosité [iv], elles se laissent parfois aller à des dérives agressives envers la Grèce même si des courants de sympathie des sociétés civiles se manifestent.
Il n’appartient pas à MEDEL de se prononcer sur la dimension politique de cet accord ni sur son aspect économique mais il appartient à MEDEL, de rappeler les valeurs européennes de Justice, Solidarité et Dignité qui étaient au cœur de sa déclaration d’Athènes du 23 mai dernier lors de la commémoration de son trentième anniversaire.
Dans celle-ci, centrée sur la garantie effective des droits fondamentaux dont les juges sont gardiens, il était souligné, notamment, que :
– Le préambule de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne proclame que “l’Union est fondée sur les valeurs indivisibles et universelles de la dignité humaine, de la liberté, de l’égalité et de la solidarité”
– “la jouissance de ces droits entraîne des responsabilités et des devoirs tant à l’égard d’autrui qu’à l’égard de la communauté humaine et des générations futures”.
– La solidarité ne doit pas demeurer un vain mot – les politiques européennes devant se conformer à ce principe inscrit dans la Charte.
Ces valeurs, alors que le devenir de la Grèce est en jeu, prennent aujourd’hui un relief tout particulier et s’imposent comme un impératif catégorique.
MEDEL est une organisation de juges, qui, comme le proclame le Conseil de l’Europe, font partie intégrante de la société qu’ils servent.
MEDEL association européenne se sent concerné tant par la société du pays de chacun de ses membres, dont la Grèce, que celle de l’Europe tout entière.
MEDEL qui veut garder espoir dans l´Europe est attentif au message envoyé par le peuple grec lors du référendum et à la réalité concrète de sa vie quotidienne.
Ce peuple peut-il continuer à supporter le mépris des droits fondamentaux des plus faibles, à cause des mesures imposées par les créanciers ? Voilà une interrogation fondée sur les principes fondateurs de l’Union Européenne aux quels les gouvernants européens doivent rester fidèles.
Certes le peuple grec n’est pas le seul peuple à souffrir des mesures d’austérité mais son devenir est un symbole de ce que la construction européenne peut apporter ou refuser aux peuples.
Par ailleurs, les citoyens grecs qui ne sont pas responsables des erreurs de leurs gouvernants, ont droit, de la part de leur classe politique à la vérité tant sur la situation de leur pays que sur l’étendue des engagements des autres pays qui ne sauraient cristalliser leur amertume.
C’est pourquoi, MEDEL
– attire l’attention des gouvernants européens sur la nécessité de prendre des mesures concrètes exprimant la solidarité européenne envers le peuple grec et le respect dû tant à sa dignité qu’à sa souveraineté.
– demande, aux femmes et aux hommes politiques responsables de l’avenir de leurs peuples et du peuple européen, d’accorder une attention profonde à la cohésion européenne. C’est ainsi qu’ils doivent renoncer aux discours simplistes et manichéens susceptibles de nourrir des réactions haineuses entre les peuples et servant les mouvements extrémistes et populistes anti-européens.
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[i] Ainsi communément appelé alors que formellement il s’agit d’ »une déclaration du sommet de la zone Euro qui « se félicite que la Grèce ait pris » divers engagements.
[ii] Nouveau programme du Mécanisme Européen de Stabilité (MES), outre un possible plan d’investissement dans le « cadre du plan Junker »
[iii] Mesures à prendre pour le 22 juillet « l’adoption du code de procédure civile, qui représente une refonte en profondeur des procédures et modalités propres au système de justice civile et peut accélérer considérablement les procédures judiciaires et réduire les coûts dans ce domaine »
Modifier des dispositions législatives récemment adoptées etc…
[iv] Exemple : l’hebdomadaire français « Le Point » faisant sa couverture avec une photographie d’Alexis Tsipras et le titre suivant « les Charlatans contre l’Europe ».